Moustache Magique

Publié le par Paraph


    Dimanche vingt-trois décembre deux mille sept. Quatorze heures quatre. Nouvelle itération hebdomadaire. De passage au domicile parental pour les fêtes. Les choses évoluent lentement. Je m'y sens encore comme chez moi, sauf peut-être les vingt premières minutes. Les habitudes mettent du temps à mourir. Depuis ma dernière entrée, les choses n'ont pas beaucoup évolué. Mes sentiments restent ambivalents quant à mon avenir professionnel, et ma décision tout sauf arrêtée. Ce matin, j'étais plutôt parti pour essayer de recoller les morceaux en janvier, et de continuer jusqu'en juin, par lâcheté, solution de facilité et confort financier. On trouve les motivations qu'on peut.

    La soirée de jeudi a ressemblé à la soirée de mercredi, à quelques exceptions près. J'ai déballé la douzaine de cartons entassés chez moi, j'en ai vidé le contenu sur la table du salon, où j'ai empilé tous les livres transbahutés d'un domicile à l'autre, entre la fin du mois d'août et le début de celui-ci. Bilan des opérations, ma table à manger est désormais presque entièrement couverte de livres, il doit y en avoir cinq cents, empilés par ordre de taille, sur une épaisseur de vingt ou quarante centimètres. Psychologiquement, c'est pour m'inciter à en acheter moins. D'un point de vue pratique, ça m'a permis de faire le tri dans ce que je voulais lire tout de suite, et de mettre de côté ce qui pouvait attendre.

    Parmi les priorités, j'ai accordé ma soirée à un roman déjanté d'Alfred Jarry, "Le surmâle", sorte de réponse à Nietzsche, qui mélange étonnamment la culture physique et la prose fin-de-siècle dandyfiante au goût de Jarry pour l'absurde. J'ai passé un très bon moment, tout à fait imprévu. Dans la foulée, j'ai exorcisé les mânes de Denton Welch en lisant, en traduction faute de mieux sous la main, "Soleils brillants de le jeunesse" ("In youth is pleasure"), publié il y a plus de soixante ans, une des références majeures de William S. Burroughs (pour lequel ma fascination remonte à une dizaine d'années): roman nostalgique et onirique, sur la fin de l'enfance, la découverte de la sensualité adolescente encore mêlée aux fantasmes ludiques des premières années. En été, au bord d'une rivière, dans un hôtel, loin de l'école et de ses songes creux.

    Ces deux romans m'ont été prêtés il y a quelques mois, et je me ferai un plaisir de les restituer à leur propriétaire à la première occasion. Dans la foulée, j'ai sélectionné une demi-douzaine d'ouvrages indispensables pour la quinzaine à venir. J'en ai d'autres à domicile, et j'en compte acquérir quelques-uns lors d'un passage prochain à Lyon, dans la boutique de mon frère, libraire de son état. Pour le moment, je viens de commencer "The android's dream", roman de science-fiction comico-diplomatique dû à John Scalzi, auteur d'une tri(pour le moment)logie découverte et appréciée un peu plus tôt cette année ("Old man's war", élégamment traduit "Le vieil homme et la guerre", et ses suites); ce roman n'a, a priori, aucun rapport avec la trilogie.

    Vendredi vingt-et-un décembre, toujours sous le coup d'un arrêt de travail virtuel, je suis rentré sur Paris, après une semaine inutile sur Orléans, puisque j'ai manqué à tous mes devoirs, ne tenant aucun de mes engagements, posant des lapins quand j'avais des rendez-vous, me mettant en situation plus que problématique vis-à-vis de ma hiérarchie, puisque je n'aurai pas de certificat médical à lui soumettre. Je me prépare de sérieux problèmes pour la rentrée. M'enfin, c'est pas moi, c'est la faute au système. Méchant système.

    Train puis vélo libre jusque chez Ramethep, pour une orgie maladroite de poulet, frites belges et nouilles chinoises. Resté dormir sur le tapis, après un passage-éclair de Vertige et un visionnage de "The ice pirates", film de science-fiction du milieu des années quatre-vingts, fortement inspiré de "La guerre des étoiles", qu'il singe et parodie avec plus ou moins de succès. Ron Perlman en corsaire de l'espace moustachu et manchot.

    Samedi vingt-deux décembre, coup d'envoi des vacances. Déjeuner chez Ramethep, puis dans le quartier latin, autour d'un bobun, avec Tonga. Escale à Massy, pour cinq petites heures, bières, jeux de cartes et discussions avec Doctor Doom, descendu de Finlande pour l'occasion, et Tormentor, récemment rentrée de Madagascar. Fin de soirée sur Paris, pour une soirée fromage coïncidant avec les trente ans de Ramethep. Discussion sans intérêt sur la politique. Comatage sur tapis devant un film, dont le titre m'échappe, avec Dennis Rodman (le basketteur aux piercings) dans le rôle d'un agent d'Interpol embarqué dans une improbable affaire d'espionnage industriel.

    Ce matin, départ discret, plusieurs kilos de pain aux noix sous le bras, jusqu'au domicile parental, pour le démembrement rituel d'un oiseau mort servi dans son jus. Programme de l'après-midi: au choix, sortie ciné avec la bande des anciens, mais je ne sais pas si je serai en état de repartir sur Paris et affronter les foules; partie de scrabble avec ma mère, j'ai une revanche à prendre; sieste indéterminée, j'ai du sommeil en retard et une dépression à cuver; promenade hivernale avec Vertige, s'il me contacte et désire arpenter les rues désertes de nos banlieues mortes.

   

Publié dans schopenhauer

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K
Il s'agit de Trollune, qui se spécialise dans la SF et la Fantasy, et fait également office de boutique de jeu spécialisé :)<br /> Karl
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H
Puis-je connaître le nom de la librairie ? <br /> <br /> *H<br /> <br /> <br />
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