Sabre au clair

Publié le par Paraph


    Lundi onze décembre deux mille six. Quatorze heures vingt-et-un. Plus qu'une dizaine de jours avant le solstice. Au train où vont les choses, je risque de passer entièrement éveillé la nuit la plus longue de l'année. Quelque chose comme seize heures d'affilée. Pas vraiment par choix, encore que. Si mes souvenirs sont bons, et ils sont lointains, les années précédentes, j'avais connu une expérience analogue. Les années se ressemblent et s'émulent dans leur médiocrité.

    Hier, passage par Massy, où nous avons vécu, ou fait semblant de vivre, le dernier ou l'avant-dernier volet avant l'antépénultième séance de notre interminable campagne de "Legend of the five rings", un jeu s'inspirant vaguement du Japon médiéval, dans un univers entièrement recomposé, où le fantastique joue un rôle plus ou moins important. C'est un jeu de rôles dans lequel j'ai longtemps eu beaucoup de mal à entrer, mais la gestion dans le groupe est suffisamment éloignée de certains travers initiaux de la gamme pour que j'y puisse trouver mon plaisir. La session d'hier était très réussie.

    Avec l'approche de la fin de cette année civile, je m'aperçois qu'en dormant le jour, je saute un à deux repas par jour. Du coup, je perds du poids, environ un kilo par semaine, en ne faisant rien de spécial. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles j'ai tout le temps faim. Je m'efforce de courber ma voracité, mais ça n'est pas facile. Il est des travers qu'on doit sans cesse réapprendre à dompter. Ca en deviendrait presque pénible, à force, si ça ne faisait pas partie des plaisirs du quotidien, ce rapport ambigu à la nourriture, et le rite social l'entourant. Hmm. Je mangerais bien une choucroute.

    Encore une fois, j'ai passé la nuit à tout autre chose que dormir. Trois ou quatre heures perdues à errer sur l'entrefilet, j'ai pu lire des biographies de gens, jouer au démineur avec des adolescents californiens, résister à la frénésie d'achat de livres qui me pousse souvent au-delà du raisonnable. Rien de bien notable. Mes cibles du moment, biographiquement parlant, sont des romanciers de science-fiction des années cinquante, et des actrices américaines, ou allemandes, des années trente. Vivre dans le passé est parfois bien commode.

    La fin de l'année semble préciser ses contours. Le réveillon du jour de l'an, pour ma part, se fera sur Massy, avec les amis locaux, et mon frère descendu de Lyon pour la circonstance. C'est toujours rassurant de se dire qu'on ne passera pas seul cette nuit angoissante, où les lambeaux de l'âge ancien sont discrètement balayés sous le tapis de la conformité sociale, un peu de champagne pour faire passer le tout et beaucoup d'amnésie pour s'imaginer faire du neuf avec les débris du vieux monde. Le tout sans télévision, gloire à Satan.

    Couché à six heures et demie, levé vers midi. Je ne passe pas tout à fait à côté de ma journée, j'ai dormi moins que nécessaire, peut-être serai-je en mesure de me recaler, à un moment plus ou moins innoportun, dans les jours ou les semaines à venir. Sans doute une question de volonté, d'où mes difficultés à gérer. Le sommeil, c'est comme l'argent, songer à le contrôler relève de l'utopie. La cour réclamera un non-lieu.

    Programme de la journée: si ça ne tenait qu'à moi, je resterais ici, à lire ou à traîner, mais les contingences mises en place par mon enthousiasme de début d'année me contraignent à l'obéissance. Je l'ai bien cherché, aussi ne me plaindré-je pas. Ce soir, trois heures d'examen en estonien. Après quoi, parties de jeu de plateau chez Edriwing. Encore cette histoire de gestion économique dans une île des Caraïbes. Je m'en lasserai probablement tôt ou tard. Possibilité de dormir sur place, ou de rentrer à l'improviste, en bus de nuit, ou à l'aube, en catafalque.

    Dans l'intervalle, il aurait fallu que je révisasse, mais je suis sans doute trop mou pour m'y plier. Il me reste une heure et demie pour partir ou attendre sur place, le temps de transport étant d'une heure et demie. Une fois rendu, jeter un vague coup d'œil sur mes notes illisibles. Examen de grammaire...

    Côté lectures, j'ai terminé "Rama", qui m'a beaucoup marqué. Et j'ai commencé "Memoirs of a geisha", d'Arthur Golden, dont je n'attends pas nécessairement grand chose, en bien ni en mal. Beaucoup de puristes pédants dans mon entourage lointain ont dénigré ce livre, sans doute sans l'avoir lu. Je pense prendre un plaisir sincère à me plonger dans l'histoire avant de passer à autre chose. A l'horizon, un roman de Jack Williamson sur la lycanthropie, et toujours la trilogie de Neal Stephenson qui me nargue depuis sa pyramide.

 

Publié dans schopenhauer

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P
C'est en cours. J'ai lu le premier volume de la trilogie le mois dernier, et j'ai acheté les deux autres, qui dorment dans un coin. 
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U
you should try the Thursday Next series (lost in a good book and the well of lost plots)
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K
C est note pour le ninja. Tu ne le connais pas car il fait partie d une confrerie secrete dans laquelle tu n as jamais mis les pieds. <br />  
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